Les réseaux sociaux, amis ou ennemis

189 millions. C’est le nombre d’individus inscrits sur MySpace, le réseau social propriété de News Corp (Rupert Murdoch). Depuis leur apparition à l’aube des années 2000, les réseaux sociaux ont été massivement adoptés par les adolescents comme nouveau moyen de socialisation, à côté du blog, du téléphone portable ou de la messagerie instantanée.

Inspirées par le succès de MySpace et Facebook, de jeunes entreprises Internet ont eu l’idée d’exploiter les réseaux sociaux dans une finalité professionnelle. Quand on sait l’importance du ‘réseautage’ au sein du monde des affaires, cette application dérivée coulait presque de source comme le montre une récente étude réalisée par An De Jonghe.

Cette chasseuse de têtes belge, employée chez Ulysses Consulting, a réalisé une enquête auprès de 850 membres de réseaux sociaux issus de 54 pays différents. Résultat: les réseaux sociaux B2B se taillent la part du lion devant MySpace et Facebook, 89% des personnes interrogées déclarant utiliser les réseaux sociaux avant tout à des fins professionnelles.

Explosion
Les acteurs sur ce marché de niche se nomment LinkedIn (Etats-Unis), Xing (Allemagne), Viadeo (France), Ecademy (Grande-Bretagne)… et leur croissance est explosive. S’il ne comptait que 85 000 inscriptions en 2003, année de son lancement, LinkedIn affiche aujourd’hui quelque dix millions de membres enregistrés. De son côté, Xing (anciennement Open BC) revendique deux millions de profils et vise, selon le quotidien La Libre Belgique, les 200 000 membres sur notre marché.

Riches de leurs bases de données, les réseaux sociaux B2B ont inauguré une nouvelle façon de faire des affaires et d’étoffer son carnet d’adresses (voir encadré), mais ils ont aussi ouvert une nouvelle brèche dans la gestion des ressources humaines au sein des entreprises: les chasseurs de têtes n’hésitent plus à utiliser LinkedIn et ses pairs comme de gigantesques annuaires où, en quelques clics, on peut savoir qui fait quoi derrière les murs d’une société.

“Les réseaux sociaux ne remplacent pas des méthodes traditionnelles comme le networking dans les cocktails, tempère un chasseur de têtes. Je crois aussi qu’ils sont complémentaires aux sites d’offres d’emploi davantage qu’ils ne les concurrencent. En revanche, il s’agit d’un bon canal pour défricher le terrain et repérer les meilleurs talents. C’est pourquoi je conseille à mes clients d’établir une politique interne dans ce domaine afin de prévenir toute hémorragie parmi les ressources humaines. Idéalement, les employés doivent savoir quelles sont les informations qu’ils peuvent rendre publiques, sur quelles plates-formes etc.”

Réputation

Atout majeur des réseaux sociaux B2B: la réputation y compte autant que le CV. “Si un individu affiche plusieurs recommandations positives associées à son profil, il s’agit d’un premier indicateur de son potentiel professionnel”, continue notre interlocuteur.

Ce système de cooptation a été poussé jusqu’à l’extrême par Xpertize (www.xpertize.be), une jeune pousse belge qui propose aux employeurs de recruter par le truchement du bouche à oreille. Les offres d’emploi sont diffusées à travers un réseau de ‘connectors’ qui touchent une somme comprise entre 500 et 3 000 euros pour chaque candidat engagé. De son côté, l’entreprise qui recourt aux services d’Xpertize paie une commission de 15 à 18% sur la base de la rémunération brute annuelle de la personne embauchée.

Parallèlement aux jeunes pousses qui ont investi ce créneau, les annonceurs ont rapidement compris l’intérêt des réseaux sociaux comme outil au service du marketing. En février dernier, Fortis a ainsi ouvert Join2Grow (www.join2grow.biz), une plate-forme destinée aux entrepreneurs européens qui peuvent y rencontrer leurs pairs, nouer de nouvelles relations d’affaires et consulter une section éditoriale où des créateurs d’entreprise partagent leur expérience professionnelle dans des interviews audio et vidéo.

Avec Join2Grow qui compte à ce jour quelque 2 000 membres actifs, Fortis poursuit un double objectif: montrer son engagement auprès de cette cible très particulière, mais aussi générer, à plus longue échéance, des prospects éventuellement intéressés par les services qu’offre cet établissement bancaire aux entrepreneurs et particuliers fortunés.

Dans un esprit similaire, Thalys et Eurostar ont lancé une initiative commune baptisée Placetobiz.eu (www.placetobiz.eu). A travers ce site communautaire, les voyageurs d’affaires peuvent s’échanger de bons tuyaux sur la vie à Paris et Londres, qu’il s’agisse des loisirs (restaurants, bars, expositions, événements…) ou du business (salles de réunions, transports…). Entre Join2Grow et Placetobiz, un même fil conducteur: augmenter la fidélité des clients grâce aux interactions que permettent ces nouvelles plates-formes.

5 façons d’utiliser les réseaux sociaux pour booster votre carrière ou votre business

1. Recrutez les meilleurs profils
Les réseaux sociaux peuvent être utilisés comme de véritables annuaires qui permettent de détecter facilement qui fait quoi dans une entreprise. Plutôt que d’utiliser les coûteux services d’un chasseur de tête, les réseaux sociaux peuvent parfois s’avérer de précieux raccourcis vers la perle rare que vous recherchez désespérément. Une plate-forme comme LinkedIn offre d’ailleurs des solutions sur mesure (‘corporate solutions’) en fonction de vos besoins.

2. Agrandissez et cultivez votre réseau
“L’ami de mon ami est mon ami.” Cet adage se vérifie particulièrement avec les réseaux sociaux B2B. Exemple: pourquoi ne pas utiliser un membre de votre réseau comme intermédiaire si vous souhaitez approcher un prospect ou un partenaire commercial que vous aimeriez compter dans votre carnet d’adresses? Réciproquement, n’hésitez pas à jouer les bons offices si un contact souhaite que vous l’introduisiez auprès d’un membre de votre entourage. Tôt ou tard, on vous renverra l’ascenseur.

3. Trouvez un nouveau job
Envie de changer d’air? Les réseaux sociaux permettent de surveiller les rotations de personnel et de déceler les besoins en recrutement d’un employeur. Certaines plates-formes comme LinkedIn vous indiquent même spontanément les postes vacants au sein d’autres entreprises et qui correspondent à votre profil. Inversement, les recruteurs n’hésitent plus à s’informer sur un candidat en interrogeant Google. Devinez quoi? Sur ce type de requête, LinkedIn apparaît souvent en tête des résultats fournis par ce moteur de recherche. Mettez donc à jour régulièrement votre profil et sollicitez des recommandations au sein de votre réseau de contacts.

4. Restez en liaison avec votre réseau professionnel
Vous n’avez pas de temps à consacrer aux congrès, salons et autres mondanités? Grâce aux réseaux sociaux, vous pouvez conserver un aperçu d’ensemble sur vos relations professionnelles, même celles que vous ne rencontrez que sporadiquement. Exemple typique: les camarades de promotion et les anciens collègues qu’on perd souvent de vue au fil des années.

5. Renseignez-vous sur votre entourage
Vous avez probablement déjà atterri dans une réunion en présence d’inconnus sans savoir comment amorcer la conversation. Au lieu de recourir aux poncifs d’usage (‘sale temps aujourd’hui, n’est-ce pas?’), vous pouvez utiliser les réseaux sociaux pour vous informer au préalable sur les personnes que vous allez côtoyer: “Tiens, on m’a dit que vous avez commencé votre carrière dans cette entreprise”. Votre interlocuteur sera d’autant plus flatté que vous connaissiez son parcours personnel. La même démarche est applicable durant les premiers jours chez un nouvel employeur si vous voulez apprendre rapidement la fonction et les antécédents d
e vos collègues.

Attention, construire son réseau social prend du temps. Pour porter réellement ses fruits, cette démarche nécessite une présence régulière au sein de votre réseau et une bonne dose d’altruisme (aider les autres sans rien attendre immédiatement en retour).